Quatre Bourgeoisies se partagent Salanfe et Clusanfe

20 septembre 2021
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La gestion de ces deux alpages est confiée à un Conseil mixte dont font partie les Bourgeoisies de Saint-Maurice, Evionnaz, Massongex et Vérossaz.

« Qu’on se figure au milieu d’un cirque d’imposantes montagnes qui dominent de 5000 pieds une vaste et splendide arène, unie comme l’onde d’un lac dans les plus beaux jours, couverte de la plus tendre verdure et des plantes alpines les plus délicates, arrosée des plus séduisants ruisseaux, et l’on saura ce que c’est que Salanfe, ou plutôt l’on ne saura rien, car personne ne peut imaginer un pareil site, si ce n’est Celui qui, l’ayant imaginé, en réalisa les beautés. »
Emile Javelle

Un peu d’histoire…
Avant d’être le paradis terrestre célébré par Eugène Rambert et Emile Javelle, Salanfe fut l’objet de convoitises très humaines pour la subsistance et la survie de populations qui comptaient le moindre carré d’herbe.
Au XXe siècle, l’altitude de l’alpage offrait une possibilité de diversification à des villages souvent pauvres, qui manquaient de terres pour l’élevage.
Le barrage hydroélectrique fut construit par EOS entre 1947 et 1952. Le lac artificiel noya le plateau de Salanfe et les quelques bâtisses existantes, dont un hôtel. La vente des terrains à EOS a nécessité la signature de toutes les bourgeoisies, ainsi que de 24 propriétaires. Un vrai tour de force pour l’époque.

On y accède :
– par Salvan et le Vallon de Van ;
– par Les Marécottes – La Creusaz, le col de la Golette ;
– de Mex, Vérossaz, Saint-Maurice, Evionnaz, par le col du Jorat;
– de Champéry, par le col de Susanfe.
L’auberge actuelle, propriété de la Commune d’Evionnaz, est un ancien baraquement ayant servi à la construction du barrage.

Ce vallon a aussi fait l’objet d’une étude pour la création d’un domaine skiable en 1973, ainsi que d’une demande en 1983 de la société « Télécabines de la Creusaz SA » pour l’aménagement de remontées mécaniques dans le secteur. Ces deux projets n’ont pas abouti.

Droit de propriété
Un acte, daté de juillet 1870, fixe la clé de répartition du droit de propriété de Salanfe et Clusanfe :
– 30/100 à la bourgeoisie de Saint-Maurice
– 28/100 à la bourgeoisie de Vérossaz
– 24/100 à la bourgeoisie d’Evionnaz
– 18/100 à la bourgeoisie de Massongex
Cette répartition est toujours en vigueur. Un Conseil mixte de neuf membres, trois de Saint-Maurice et deux de chacune des autres communes, gère le site.

Situation actuelle

Salanfe
Le chalet d’alpage, servant d’écurie et de logement pour le berger, a été construit à son emplacement actuel pour permettre l’exploitation des pâturages entourant le lac artificiel.
Plus de deux cents génisses inalpent début juillet et désalpent en septembre. Pour la plupart, elles descendent de Vérossaz aux Cases par la Poya, poursuivent sur la Rasse, les Hautes, le col du Jorat, avant de redescendre sur Salanfe. C’est une transhumance pénible pour les bovins, unique en Valais, celle-ci se déroulant sur deux jours et impliquant un bivouac au pied de la montée du Jorat. Le torrent, qui serpentait à travers le plateau de Salanfe, subsiste dans le vallon de Van et se précipite dans les gorges, avant la grande chute dite « Cascade de la Pissevache » à Miéville.

Clusanfe
Un chalet permet au berger et à sa famille de séjourner sur l’alpage pour toute la période d’estivage des moutons. Les chiens de berger surveillent également le troupeau qui se déplace sur la montagne. Le loup est une menace et les mesures sont adaptées chaque année afin d’éviter, dans la mesure du possible, l’attaque de ce grand prédateur. Les ovins inalpent et désalpent en passant par le col du Jorat et le col de Susanfe.

Un règlement fixe le mode de jouissance et de police des montagnes de Salanfe (bovins) et de Clusanfe (ovins). Approuvé par le Conseil d’État le 24 octobre 1979, il a remplacé celui établi en 1953 et validé en 1954.
Chaque dernier samedi de juillet, les neuf membres du Conseil mixte se réunissent à Salanfe pour une assemblée annuelle ordinaire. À cette occasion, le Conseil rencontre les exploitants pour échanger sur la collaboration et procéder à l’inventaire du bétail.

Le président et le secrétaire du Conseil bourgeoisial de Saint-Maurice sont de droit président et secrétaire du Conseil mixte.

Article extrait de la publication « Le Bourgeois » No 1 – septembre 2021