La forêt au chevet de l’environnement

19 mai 2023
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Responsable de bien des maux environnementaux, le dioxyde de carbone est au centre de toutes les attentions. La forêt joue un rôle essentiel pour diminuer sa présence dans l’atmosphère.

Produites principalement par les activités industrielles et les transports, les émissions de dioxyde de carbone (CO2) doivent impérativement diminuer afin de préserver le climat. Ce gaz est issu de la combustion d’énergies fossiles non renouvelables utilisées par les activités humaines. C’est un des principaux gaz à effet de serre (GES) qui sont responsables des changements climatiques. 

Moins en produire est une piste, tout comme trouver des moyens de les capter et les stocker. Et c’est là que le rôle de la forêt s’avère extrêmement important.

Par le mécanisme de photosynthèse (voir schéma Je nettoie l’air et l’eau), les forêts captent 15% des émissions de dioxyde de carbone produites par les êtres humains. L’arbre absorbe le CO2 et stocke le carbone sous forme de bois. Le carbone reste emprisonné dans les racines, le tronc et les branches, où il sert à créer la matière organique essentielle à la croissance de l’arbre. L’oxygène, quant à lui, est rejeté dans l’atmosphère. 

D’un gaz néfaste à un matériau durable

La quantité de CO2 ainsi capturée dépend de la variété de l’arbre, de son implantation, de son âge, entre autres. Les arbres arrivent donc à transformer ce gaz néfaste en bois : un matériau solide, utile, durable et écologique. Tant que le carbone y est stocké, il n’est plus dans l’atmosphère et l’environnement en sort gagnant. La forêt et les produits du bois jouent donc un rôle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques.

Avoir en permanence une abondance de forêts en pleine croissance et utiliser le bois comme matériau et énergie, en remplacement d’autres qui ont une plus forte empreinte écologique, est bénéfique à la société et à l’environnement.

Se racheter après avoir pollué

Un certificat CO2 représente la quantité d’émissions pour lesquelles les entreprises s’engagent financièrement à soutenir des projets climatiques. Un certificat correspond à une tonne de gaz à effet de serre. Pour chaque tonne émise, le détenteur du certificat doit investir de l’argent et apporter ainsi sa contribution à la protection du climat.

Fortes de ce constat, plusieurs associations cherchent à valoriser le potentiel des forêts dans la lutte contre le dioxyde de carbone. Parmi elles, Forêt Suisse pour la protection du Climat qui a pour mission d’encourager la commercialisation de certificats de CO2 (lire encadré ci-contre) afin de valoriser la prestation de la forêt dans le captage et le stockage de ce gaz à effet de serre. 

Après des travaux de plus de deux ans, une méthode de calcul – homologuée par la Confédération – a permis de quantifier les quantités de CO2 séquestrées par les forêts et ainsi de démontrer l’importance de leur rôle de captation lorsqu’elles sont exploitées durablement. A noter que les certificats obtenus sont commercialisables sur le marché volontaire uniquement, car la Loi sur le CO2 exclut actuellement la séquestration de carbone par la forêt du marché obligataire. Cette Loi est cependant en révision, la situation pourrait changer prochainement.

Quant à Forêt Valais, association faîtière forestière valaisanne qui regroupe les trois associations forestières régionales et la Fédération des Bourgeoisies, elle est à la recherche de solutions réalisables dans le canton en termes de certification CO2. En 2019 déjà, elle avait soumis à l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) une esquisse de projet de séquestration biologique pour la filière forêt et bois en Suisse. L’idée était, d’une part, d’augmenter les volumes de bois récoltés et, d’autre part, de soutenir financièrement les maîtres d’œuvre qui construisent en bois suisse.

Ce projet n’a pas abouti. Aujourd’hui, les scieurs suisses engrangent annuellement des millions de francs, en transformant les produits de la forêt en produits du bois pour la construction, alors que les fournisseurs de matière première (propriétaires de forêts, entreprises et triages forestiers) ne reçoivent aucun pourcentage du bénéfice réalisé par l’industrie du bois.

La Valais se réchauffe plus vite que les autres cantons

La vallée du Rhône a enregistré jusqu’à maintenant un réchauffement supérieur à la moyenne suisse. Malheureusement, il faut s’attendre à ce que cette tendance se poursuive. L’augmentation moyenne, qui va perdurer jusqu’à la fin du 21e siècle, est de deux à trois degrés (marge d’incertitude ±1°C) en fonction de la saison et de l’altitude. En Valais, le réchauffement devrait donc être légèrement supérieur à la moyenne suisse. Dans 40 ans, un été normal à Sion, Viège ou Zermatt pourrait correspondre à un été caniculaire comme celui de 2003.

Limiter l’exploitation comme à Soleure ?

Fort de ce constat, Forêt Valais a recherché des solutions sur le marché libre, donc volontaire. Parmi elles, celui du renoncement partiel à exploiter la production biologique de la forêt. Un tel projet a déjà été mis sur pied par la Bourgeoisie de Soleure. Ce modèle convient à certaines régions de Suisse, mais n’est pas adapté aux forêts de montagnes du Valais. Les risques de cette approche ne sont pas à négliger, car il est difficile de prévoir l’impact des changements climatiques et de la sécheresse sur les forêts valaisannes.  De plus, il ne serait pas raisonnable de limiter aussi fortement les exploitations forestières, alors que le bois a un rôle à jouer en tant que combustible de substitution, de matériau et comme puit de carbone. A noter également que cette mesure aurait un impact sur les places de travail et l’économie locale.

Pour cette raison, le comité de Forêt Valais a mandaté des experts pour développer une approche qui permette de soigner les forêts et de valoriser leur bois dans des constructions plutôt que comme stockage temporaire de carbone in situ. Les forêts valaisannes sont vieillissantes et manquent de jeunes arbres. Elles souffrent du changement climatique et ont besoin d’un soutien pour s’adapter aux nouvelles conditions.

Les essences existantes ne pourront pas toutes survivre à cela et il faudrait augmenter leur diversité en amenant des nouvelles essences adaptées au changement climatique.

De plus, le bois gagne en importance. Il est non seulement utilisé comme source d’énergie pour pallier en partie aux pénuries, mais également comme puit de stockage. Un mètre cube de bois stocke environ 1 tonne de CO2 pendant la durée de vie de l’objet ou du bâtiment. Les exploitations forestières n’étant plus rentables depuis plus de quarante ans (le prix de vente du bois ne couvre pas les coûts d’exploitation), les propriétaires ne peuvent relever seuls le défi de rendre leur propriété résistante aux changements climatiques.

De ce constat est né le projet « ForêtClimat-Valais » : un appel aux entreprises et aux particuliers de soutenir les soins aux forêts. Un projet pilote est actuellement en cours. Il prévoit de rémunérer les soins spécifiques donnés à la forêt pour l’aider à s’adapter, de façon durable, aux changements climatiques. Chaque année, un certificat sera également délivré par Forêt Valais à ces projets régionaux. 

 

Article extrait de la publication « Le Bourgeois » No 4 – mai 2023